Source : APM

 

LYON, EPINAL, 30 novembre 2007 (APM) - La Société hospitalière d'assurance mutuelle (Sham) a fermement démenti vendredi les accusations selon lesquelles elle contesterait le fait que des patients de l'hôpital d'Epinal (Vosges) ont été surirradiés et freinerait ainsi les indemnisations.

 

Jeudi soir lors d'une conférence de presse puis vendredi matin dans un communiqué, l'Association vosgienne des surirradiés de l'hôpital d'Epinal (AVSHE) a annoncé son intention d'alerter le président de la République sur la question de la reconnaissance du statut de victimes des surirradiés et sur celle de leur indemnisation.

 

"Pour faire entendre plus clairement notre voix, nous allons appeler le président de la République à l'aide. A cette fin, une lettre qui lui sera destinée, sera remise au préfet des Vosges vendredi à 18 heures", a indiqué à l'APM le président de l'AVSHE, Philippe Stäbler.

 

L'association, qui regroupe désormais plus de 150 adhérents, réagit à une requête en référé déposée auprès du tribunal administratif de Nancy par l'assureur de l'hôpital qui "laisse entendre que nous ne serions peut-être pas surirradiés", explique son président.

 

C'est une phrase employée dans la requête indiquant que des patients "auraient été surexposés", employant donc le conditionnel et sans employer le mot surirradié, qui a jeté le feu aux poudres.

 

L'assureur soulignerait en outre dans sa requête qu'il n'aurait pas d'éléments pour savoir si la procédure de radiothérapie était vraiment constitutive de "dommages". Pour le président de l'association, une telle démarche vise en réalité à rallonger les procédures et à diminuer les indemnisations.

 

Rappelant que la ministre de la santé avait demandé, le 13 septembre dernier, que les victimes de la radiothérapie d'Epinal soient indemnisées et estimant que cette promesse n'a pas été tenue, l'AVSHE en appelle maintenant à Nicolas Sarkozy en espérant être reçue par lui.

 

REQUETE POUR LA DESIGNATION D'UN COLLEGE D'EXPERTS

 

Contacté vendredi matin par l'APM, le nouveau directeur de l'hôpital d'Epinal, Gilbert Hangard, a confirmé le dépôt d'un référé auprès du tribunal administratif de Nancy mais a précisé qu'il avait été déposé par l'assureur de l'hôpital, la Sham, et non par l'hôpital lui-même.

 

Gilbert Hangard affirme qu'il ne s'agit pas de remettre en question le principe d'une surirradiation.

 

"L'objectif de la Sham, qui assure l'hôpital d'Epinal depuis 2002, est d'obtenir la désignation d'un collège d'experts pour déterminer le partage des responsabilités et pour savoir si toutes les complications dont souffrent actuellement les patients sont liées à la surirradiation", explique-t-il.

 

"Cela correspond à une démarche classique de recherche en responsabilité", souligne-t-il en rappelant également que les deux radiothérapeutes qui exerçaient à l'hôpital effectuaient une partie de leur activité en libéral.

 

De son côté, sortant pour la première fois de son silence depuis le début de l'affaire d'Epinal, la Sham conteste vigoureusement les accusations portées jeudi soir par l'association et relayées par un avocat, Me Gérard Welzer, dans un article publié par le quotidien Libération vendredi matin.

 

C'est "un mensonge de dire que les assureurs ont engagé des procédures pour contester les surirradiations", affirme le directeur général de la Sham, Jean-Yves Nouy, dans un entretien exclusif à l'APM, vendredi.

 

"Nous avons engagé fin octobre une procédure de référé-expertise pour avoir accès aux dossiers médicaux et demander au tribunal administratif de désigner un collège d'experts avec sapiteurs, c'est-à-dire de spécialistes du domaine, en vue de définir les responsabilités et d'évaluer le préjudice des victimes. A l'époque, ce référé a été adressé aux dix victimes qui n'avaient pas de conseil", explique-t-il.

 

Cette procédure peut être étendue à toutes les victimes qui ont adressé des réclamations soit directement auprès de la Sham, soit par le biais de leur conseil. A ce jour, la Sham a reçu 92 réclamations.

 

Parmi elles, 52 appartiennent à la cohorte des 400 patients ayant reçu un surdosage d'environ 8% entre 2001 et novembre 2006, 40 à celle des 300 patients surirradiés d'environ 7% entre 1989 et 2000.

 

"Nous avons suggéré aux conseils concernés de se joindre à cette procédure d'expertise. Mais nous n'avons pas la réponse de tous. Me Welzer a indiqué qu'il refusait cette procédure", indique Jean-Yves Nouy.

 

"Pour les victimes qui n'ont pas d'avocat, nous nous sommes adressés directement à elles à travers le centre hospitalier", ajoute-t-il.

 

"L'hôpital d'Epinal étant un établissement public, c'est à la juridiction administrative d'intervenir", souligne Jean-Yves Nouy. "Nous ne pouvons pas indemniser les victimes sur une base purement compassionnelle mais uniquement dans un cadre légal. Si le gouvernement souhaite une indemnisation compassionnelle, c'est à l'Etat d'intervenir".

 

Jean-Yves Nouy indique par ailleurs que la Sham a déjà versé des indemnisations provisionnelles à 16 des 24 patients surirradiés à plus de 20% qui constituent la première "cohorte" des patients surexposés de l'hôpital d'Epinal.

 

Sur ces 24 personnes, 21 patients ou leurs ayants droits ont déposé des réclamations dont 19 donnent lieu à des expertises, à l'amiable pour 16 et judiciaires pour trois.

 

"Dès que des expertises ont été rendues, nous avons procédé au versement d'indemnisations provisionnelles. Une fois qu'elles seront consolidées, nous verserons les indemnisations définitives", détaille Jean-Yves Nouy sans donner le montant des provisions versées.

 

"Mais nous ne pouvons pas verser d'indemnisations si nous n'avons pas accès au dossier médical", insiste-t-il.

 

Le directeur général de la Sham indique qu'il est d'accord pour rencontrer des membres de l'AVSHE. "Nous sommes également à la disposition de l'établissement pour rencontrer toutes les victimes qui ont engagé une procédure de réclamation", ajoute-t-il.

 

L'hôpital de son côté poursuit le suivi médical des patients surirradiés qui, selon l'AVSHE, se déroule de manière "satisfaisante".

 

Ce suivi sera poursuivi en 2008 par un radiothérapeute de Nancy, à partir de mars, qui prendra la suite du Dr Jean-Marc Simon, précise le directeur, Gilbert Hangard.

 

La réouverture du service de radiothérapie de l'hôpital d'Epinal est prévue pour fin janvier 2008.

 

Mais elle est conditionnée à la visite de conformité que l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) doit effectuer au préalable, précise le nouveau directeur.