La salle n’est pas remplie (entre 20 et 30% des places assises sont occupées). Il y a plus de monde à Epinal semble-t-il, où la proportion de présence est presque l’inverse.

Ce jour, les administratifs, tutelles et pouvoirs publics sont entendu, que ce soient les intimés ou par témoignage.

 

La séance débute par l’audition de Mme Dominique Capelli, ex-directrice du CH Jean Monet à l’époque des faits.

Mme Capelli expose l’organisation générale du CH et des services avec leur chefferie. Au niveau des services, le médecin chef de service est également l’exploitant par la nature des autorisations nominatives qu’il détient. Ainsi, la responsabilité du directeur d’établissement est pour elle relative réduite.

Le président questionne à propos des demandes d’investissement, si ces dernières étaient les sources des conflits et des oppositions. Mme Capelli répond qu’il y avait effectivement des demandes d’investissement en termes de matériels. Lorsqu’elle a pris la direction, un scanner acheté en 2001 avait empiété sur 2 années de budget (2001 et 2002), et le CHJM (CH Jean Monet) avait un endettement de 70%. Par ailleurs, il y avait des matériels de réanimation à acquérir.

Le président demande si les requêtes de matériel des radiothérapeutes étaient fondées et argumentées, ce à quoi Mme Capelli répond que oui, elles étaient argumentées.

Le président demande des précisions quant au poste de radiophysicien. « Était-ce une demande récurrente ? ». Mme Capelli était d’accord de principe sur cette demande, mais il lui était impossible de créer un second poste autrement que par une demande à l’ARH, car au sein de son établissement elle devait déjà composer avec des postes à ne pas renouveler, ou des lacunes de RH dans d’autres secteurs.  Elle expose en outre qu’en 2004, un audit mené par le réseau régional ONCOLOR n’avait rien décelé. Mme Capelli souligne par ailleurs qu’on ne trouvait pas de radiophysicien à cette époque sur le marché du travail, et elle a demandé à Nancy, ainsi que dans les autres sites de la région, s’il était possible d’avoir une vision partagée des RH en radiophysique.

Le président rebondit sur cette notion de « temps partagé », précisant que JA (Joshua Anah) allait à la clinique de la Ligne Bleue un jour par semaine malgré le déficit de ressources au CHJM. Mme Capelli dit avoir découvert cette situation. Elle déclare avoir eu peur de rompre le contrat entre le CH et la clinique de la Ligne Bleue, site privé, par crainte de « guerre avec le secteur privé dans une petite ville », de « tensions ». Elle précise toutefois que ces interventions de JA devaient se faire sur des heures supplémentaires, pas sur son temps de travail au CHJM.

Sur la démission de JFS (Dr Sztermer), Mme Capelli répond au président que les causes de sa démission de la chefferie du service de radiothérapie a été due « au matériel », « à la peur de l’accident médical »… mais elle dit de plus se souvenir des raisons profondes. Avec MA  (Dr Aubertel), il y avait toujours ces questions récurrentes autour du matériel. Mme Capelli fat alors une comparaison avec le CH de Mulhouse pour appuyer ses inquiétudes sur la capacité du CHJM à financer les investissements de la radiothérapie avec si peu de lits. Enfin, elle dit que lorsqu’elle est arrivée au CHJM, elle a été la première femme directrice, donc une différence notable avec ses prédécesseurs, et que les autres directeurs « chouchoutaient la radiothérapie ».

Le président demande donc s’il fallait veiller à ce que la radiothérapie reste proportionnelle à la taille du CH. Mme Capelli réexpose globalement les mêmes arguments, notamment que la CH était sous-dimensionné pour accueillir de la radiothérapie.

Sur la question de ses relations avec l’AH et la DASS, Mme Capelli répond qu’elle avait mandat pour rétablir la place, l’autorité d’un directeur d’hôpital. Sur ses relations avec le président du CA (conseil d’administration), elle répond qu’elles étaient fluctuantes. Pour illustrer, elle précise qu’elle est restée 6 ans à Epinal, et qu’ensuite, entre 2007 et 2014, 9 directeurs se sont succédé, sans compter les intérims.

Le président en vient aux faits, les accidents de radiothérapie, et demande « par qui » Mme Capelli a appris ces accidents. Elle répond que c’est par MA, pour 22 personnes (puisque Mr Masson était décédé). Elle déclare que « le sol s’est ouvert sous ses pieds », bien qu’elle ait connu et géré d’autres situations auparavant (comme un assassinat en psychiatrie par exemple). Elle dit que MA lui a fourni tout le contenu de la problématique. Elle dit que lorsqu’elle a appris cela, le 14 septembre 2005, elle n’a pas joué la montre, mais seulement reporté au lendemain, le 15 septembre, pour traiter l’affaire. Le président se demande pourquoi. Outre ses occupations du moment, Mme Capelli ne voyait pas l’urgence immédiate à laisser tout de côté immédiatement pour traiter l’affaire, qu’il n’y avait « pas de feu à éteindre », qu’elle avait besoin de recul… le président ne semble pas convaincu par ces arguments et ne comprend pas bien que tout le monde renvoie cette affaire au lendemain compte tenu de sa gravité, d’autant plus qu’elle a dit que « le sol s’est ouvert sous ses pieds ». Mme Capelli précise, elle était tétanisée, elle avait besoin de réaliser, de reprendre son souffle…

Le président demande alors si le lendemain, le 15 septembre 2005, les explications ont été complètes, et que s’est-il passé ? Mme Capelli raconte que MA, JFS et JA sont venus dans son bureau, expliquer dans un premier temps qu’il s’agissait d’une erreur de manipulation qui est devenu ensuite une erreur de calcul de dosimétrie. Il est porté à sa connaissance que 3 à 5 personnes ont des complications. Dans ses courriers ultérieurs, elle ne fait que retranscrire les éléments portés à se connaissance. Elle souligne que le 15 septembre dans son bureau, les 2 radiothérapeutes ont eu une attitude responsable. Elle procède ensuite, le 15 et 16 septembre, à la rédaction des courriers (DASS, médecins inspecteurs, ARH, assurances…).

Le président demande qui, selon Mme Capelli, devait être en première ligne pour gérer tout cela. Elle répond que le « système est imparfait », qu’il y avait « un flou » entre ARH et DASS, mais l’ARH devait être en première ligne. Elle est restée sans nouvelles de la DASS assez longtemps concernant le rappel des patients. Elle déclare que ARH et DASS lui ont semblé chacune vouloir être la « première par rapport à l’autre » pour obtenir les informations et détails de sa part, mais qu’ensuite ARH et DASS se « renvoient la balle ».

Le président convient que Mme Capelli a « arrosé » large et vite, mais ensuite, que s’est-il passé jusqu’au 5 octobre ? Mme Capelli déclare que MA est parti en congés (le président appelle MA immédiatement à la barre pour confirmer). MA confirme, et précise avoir dit à Mme Capelli qu’il lui était possible de revenir si besoin. Le président insiste : « dans une telle situation, vous trouvez normal de partir en congés ? ». Ma dit que c’était prévu, pour une seule semaine, et que c’était pour octobre… Le président en conclue que donc, pour la suite, il faut attendre le 5 octobre pour que tout le monde soit disponible (il est visiblement surpris et agacé par le flou et absences de raisons de ce délai entre le 15 septembre et 5 octobre…). Mme Capelli évoque alors cette réunion du 5 octobre 2005, comme une réunion « d’information large ». Elle redit qu’elle voulait et attendait le rappel des malades. Le président demande si alors elle n’aurait pas pu avoir l’intention d’alerter elle-même le ministère de la santé. Mme Capelli répond « non, cela ne se fait pas », et en revient à la réunion du 5 octobre, avec 4 personnes présentes dans les locaux de la DASS à Epinal (MA, Mme Meynard de la DASS, Mme Pillon médecin inspecteur et elle-même). Il n’y a pas eu de compte-rendu de réunion formalisé selon Mme Capelli, qui attendait des décisions puisque le délai de 15 jours pour prévenir les patients était déjà dépassé.

Le président questionne au sujet des interprétations différentes des présents à cette réunion du 5 octobre 2005. Mme Capelli dit que tout a changé à partir du moment où il a fallu prévenir les patients. Pour MA, comme il s’agissait d’une erreur de radiophysique, ce n’était pas à lui de prévenir puisque JA était un personnel rattaché à l’administration, donc c’était à un administrateur de prévenir les patients. Mme Capelli dit qu’elle s’est sentie « trahie », qu’elle est restée « choquée ». Pour les patients qui ne présentaient pas (ou plutôt « pas encore ») de symptômes d’effets secondaires, il a été dit lors de cette réunion que « ce n’était pas la peine de les alarmer », qu’il ne « fallait pas faire peur à la clientèle » (les malades du cancer étant des patients différents des autres malades, donc à gérer de façon différente, en prenant plus de précautions au niveau psychologique… voilà les arguments exposés).

Au final, Mme Capelli raconte que c’est elle qui informera les patients ayant des effets secondaires. Le président demande « informer qui de quoi ? ». Elle répond elle-même plus MA pour les patients avec complications, et pour les autres une lettre des médecins pour qu’ils viennent passer une visite médicale. Le président en conclut donc qu’au fur et à mesure des complications, elle informe… « Mais de quand à quand ? ». Mme Capelli informe les patients, mais ne se souvient plus de la durée de la période. Elle se souvient juste de Mr Laruelle qui lui aurait dit « pas la peine d’alerter les autres patients pour rien, éviter des paniques, aller vite car on est vieux, éviter de faire comme pour le sang contaminé… » Elle dit que c’est le 1ier « versant patient » qu’elle a eu au sujet de la diffusion de l’information aux patients.

Le président demande si elle avait encore des attentes de la part des tutelles. Mme Capelli dit oui : des expertises, des enquêtes. Elle dit que rien ne s’est passé, qu’elle a été très étonnée du silence des médecins inspecteurs.

Le président demande confirmation qu’il y a eu tout de même une enquête, celle de l’ASN. Mme Capelli répond que oui, une enquête de routine dont elle a été mise au courant par le double du courrier adressé au chef de service de la radiothérapie, rien de plus. Elle savait juste que l’ASN venait dans le CH. Elle n’a pas été appelée ce jour-là pour rencontrer l’ASN.

Le président demande si Mme Capelli s’est assuré que le service de radiothérapie a révélé  l’accident à l’ASN. Elle répond qu’elle a appris ensuite que MA a dit à l’ASN qu’il n’y avait pas eu d’accident. Elle a donc précisé à MA qu’il engageait sa responsabilité.

Le président n’ayant plus de questions, il passe la parole aux parties civiles.

Me Weltzer revient sur certains points évoqués précédemment par les questions du président. A propos de l’entretien d’évaluation que Mme Capelli a eu en octobre 2005 avec Mr Sans, elle a évoqué en fin d’entretien les sur irradiations. « Mr Sans n’a pas eu de réaction ». Sur la possibilité d’annulation des congés de MA, Mme Capelli confirme qu’elle n’a pas le souvenir que MA le lui ait proposé. Me Weltzer demande si, lors des rencontres du 15 septembre, il avait été décidé d’informer les patients. Mme Capelli répond par l’affirmative, et ce devait être aux radiothérapeutes de s’en charger, elle répète qu’elle n’a pas de compétences médicales. Me Weltzer demande ensuite qu’elle confirme néanmoins que par la suite, en octobre, c’est elle qui sera chargée de cela, et elle confirme.

Cela lui permet d’enchainer sur ces informations aux patients : « si vous aviez décidé d’écrire à tous les patients, aviez-vous le fichier de la liste de tous ces patients ? ». « Non », son rôle de directrice de séparer le secteur public / privé n’a pu être fait par elle, les radiothérapeutes le faisaient eux-mêmes, et il n’y a pas eu de problèmes avec la CPAM. Elle recommence à pleurer de façon plus soutenue, elle dit qu’elle ne regrette pas tout ce qu’elle a fait pour les malades… et joue sur la corde sensible en évoquant « … une leçon d’humanité incroyable… » qu’elle a vécu.

L’avocat général prend le relais de Me Weltzer. Il dit qu’en première instance, Mme Capelli a déclaré que le service de radiothérapie était « un état dans l’état », qu’elle a essayé de le réintégrer dans le collectif. Il demande donc quelle était l’attitude des autres médecins du CHJM par rapport par rapport aux radiothérapeutes ? Mme Capelli, comme en première instance, répond que les radiothérapeutes n’intégraient pas les comités du CH. Les autres médecins les voyaient comme des « nantis », « d’un mauvais œil ». Elle répète que le nombre de lit ne suffisaient pas pour financer les équipements de la radiothérapie.

L’avocat général revient sur le fait que l’inspecteur référent du CHJM à l’ARH n’est pas prévenu, et c’est Mme Pillon de la DASS qui débarque. Il demande si elle n’aurait pas pu faire appel à lui. Mme Capelli répond qu’elle ignorait comment l’ARH est organisée, dit que « ce n’était pas lisible ». Elle dit que certains patients ont eu « un rejet du monde médical », qu’ils ne voulaient pas revoir leur radiothérapeute.

L’avocat de MA intervient, pose quelques questions pour en venir à la précision qu’il n’y avait finalement que  patients qui ont refusé de revoir leur radiothérapeute. Mme Capelli précise qu’elle parle des patients qu’elle a vu. Elle en profite pour relater ses mauvaises relations avec MA, qu’il « ne disait pas bonjour », « faisait toujours la tête »…

L’avocat de MA demande si les radiothérapeutes lui transféraient les dossiers médicaux. Elle répond « non » ! ». Elle « partage seulement le secret professionnel, pas le secret médical ». Elle a fait uniquement avec les informations qui lui étaient transférées, et avec sa propre compassion. L’avocat demande alors pourquoi les différents secrétariats, le sien et celui des médecins, ne pouvaient pas communiquer sur la liste des patients. Elle répond qu’elle n’a pas le droit d’avoir les dossiers médicaux. A ce moment, Mme Capelli étant visiblement troublée et au bord d’être mise en défaut, Me Weltzer intervient pour préciser qu’elle s’est battue pour avoir les données administratives des patients traités en radiothérapie, mais sans succès… s’en suit quelques échanges et discussions « ping pong » à propos des accès aux données, aux activités public / privé, aux rétrocessions de 60% au CH par les radiothérapeutes de leurs activités privées… l’absence de passerelle entre le SIH et le logiciel de la radiothérapie (développé par JA) est évoqué, parmi d’autres éléments.

Le président s’étonne que la directrice du CHJM ne sache pas qui se trouve dans ses locaux, ni à quel titre… et invite Mr Humbert (actuel directeur adjoint du CH) à éclaircir. Il explique que maintenant c’est possible, mais qu’avant non. Il précise que cela a été compliqué (il évoque la passerelle entre ARIA et SIH). L’avocat de MA souligne donc que c’était possible… et demande si Mme Capelli a connaissance du protocole « alerte santé » de la DHOS à l’époque. Visiblement, elle ne connait pas ces modalités…

L’avocat de MA en vient donc à la conclusion qu’il y a un « véritable autisme administratif » qui s’ajoute à celui des médecins. Me Weltzer en profite pour souligner à la cours que son homologue convient donc l’existence de « l’autisme médical ».

L’avocat de JFS repose la question des données administratives, et logiquement Mme Capelli redit que si les données administratives et médicales ne sont pas séparées, elle ne peut pas avoir accès aux dossiers des patients.

Cette réponse ne semblant toujours pas satisfaire, un des avocats des médecins revient sur l’activité privée. Mme Capelli dit qu’elle avait juste les montants de ces activités, pas d’actes et encore moins de listes d’actes. Elle dit que cette gestion administrative avait été déléguée aux radiothérapeutes avant son arrivée, et qu’elle n’a jamais pu le récupérer.

Son audition s’achève, et le président appelle Mr J. Castex, entendu à titre de témoin.

 

Mr Castex travaille à la cours des comptes des Pyrénées Orientales. Entre janvier 2005 et septembre 2006, il était directeur de la DHOS au ministère de la santé. Après avoir prêté serment, le président lui demande comment il a été informé des accidents de radiothérapie. Mr Castex répond « en 2006, grâce au système d’alerte DHOS-alerte mis en place suite à la canicule. Il précise ne pas avoir eu d’information antérieure.

Le président évoque immédiatement le courrier égaré à la DHOS, dont finalement la trace a été retrouvée suite à une perquisition à la DHOS, courrier enregistré dans les « départ » au lieu de « arrivée », visiblement à l’intention de Mr Claude Rolland à la sous-direction E (organisation interne des établissements de santé). Mr Castex parait embarrassé, parfois gêné et cela à de multiples reprises lors de son audition (à tel point qu’à un moment, le président le rassure qu’il ne risque rien, n’est pas un prévenu ni un intimé, qu’il peut s’exprimer librement…). Mr Castex suppose que le contenu du courrier ne devait pas être assez explicite pour déclencher l’alerte. Le président réagit immédiatement, comme il le fera à plusieurs reprises à ce sujet en citant l’objet de ce courrier : « accident itératif en radiothérapie », et s’étonne vivement qu’un tel objet ne soit pas assez explicite… Mr Castex répond sans réellement donner d’explications, sauf celle d’ignorer les règles d’archivage des courriers à la DHOS. Il dit qu’il n’a jamais donné ordre de détruire le courrier.

Le président lui pose alors la question de ses souvenirs d’information sur le CH d’Epinal. Mr Castex répond que c’était un hôpital vétuste, avec des problèmes de difficultés internes et de management, des tensions comme ailleurs, mais rien de plus, sauf que le CH était en concurrence avec le secteur libéral de la Ligne Bleue. En bref, la DHOS a attendu les résultats de l’enquête ASN-IGAS.

Les échanges sont ensuite assez rapides, et les explications peu convaincantes, sauf à démontrer des rouages administratifs complexes et inefficaces.

Me Weltzer demande qui était son interlocuteur en Loraine en 2009, et Mr Castex répond que c’était Mr Sans, directeur de l’ARH. Me Weltzer demande s’il s’est informé de quoi que ce soit auprès de Mr Sans sur ce sujet. Mr Castex répond que c’était naturel. Me Weltzer lui rappelle alors qu’il a interpellé Mr Sans pour savoir pourquoi il n’a pas donné l’alerte. Me Weltzer demande donc si Mr Sans aurait été lui-même sous informé. Le procureur demande quels sont les rôles et compétences des ARH face aux accidents.

Mr Castex, embarrassé, explique les rôles de l’ARH, dont celui d’allocution des moyens aux établissements. Pour la partie « sécurité sanitaire », la question du rôle des ARH n’était pas assez tranchée. Il devait y avoir collaboration entre ARH, DASS et préfecture…  Il s’en suit des échanges pour tenter de percer les rouages administratifs d’alerte de l’époque entre les différentes administrations et tutelles. On ne perçoit rien d’autre qu’un flou, et une impression de mille feuilles. Cette situation est décrite par le procureur comme un « paradoxe », d’autant plus que la Loraine était à l’époque un pilote pour les dispositifs d’alerte… Au final, Mr Castex admet que ces sur-irradiations ont constitué une des affaires sanitaires les plus graves, et avec des dysfonctionnements du système d’alerte. Il émet toujours des doutes sur le contenu du courrier de la DASS à la DHOS, qu’il n’a jamais eu ni lu. Surpris, le président lui demande confirmation qu’il ne nie pas l’existence même de ce courrier, ce qu’il confirme.

Le procureur pose la question de « qui doit réagir ? ». « DASS ou ARH ? ». Mr Castex répond que les 2 doivent réagir. Le procureur demande alors si Mr Castex pense que la réunion du 5 octobre 2005, à 4 protagonistes, était suffisante à ses yeux. Mr Castex expose ne pas savoir réellement répondre puisque son avis dépendrait des informations dont ce groupe de 4 personnes disposait.

L’avocat de MA demande à quelle fréquence il rencontrait Mr Sans. Mr Castex déclare qu’il y avait des réunions mensuelles voire bimensuelles entre DHOS et ARH, plus d’autres réunions particulières, plus des échanges de mails… L’avocat de MA demande alors si Mr Sans lui a parlé du problème de radiothérapie au CHJM, s’il a vu Mr Sans à ce sujet. Mr Castex distingue les réunions larges et générales des entretiens. Il ne se souvient pas. Il répète qu’il découvre les accidents de radiothérapie en juillet 2006.

L’avocat de MA tente d’échanger avec Mr Castex sur les problèmes de « procédure défaillante » du système « DHOS alerte » qu’il remet en cause. Pour l’avocat, il y a responsabilité de la DHOS.

C’est l’heure de la pause.

 

Après la pause de 20 minutes, Mme F. Meynard (directrice de la DASS à Epinal à l’époque) est auditionnée. Elle travaille actuellement à l’ARS de Toulouse. Après la DASS des Vosges, elle a été à celle de la Côte d’Or, puis est partie travailler dans les ARS.

Elle cite le CHJM comme un établissement de référence dans le département, donc représentation de nombreuses disciplines hospitalières. Il y avait la perspective d’une nouvelle construction de l’hôpital, avec une réorganisation à la clef en impliquant les partenaires du secteur privé. En interne au CHJM, Mme Meynard cite des difficultés de recrutement de personnel dans les Vosges.

Le président lui demande plus de détails sur la radiothérapie, et Mme Meynard dit qu’il n’y avait rien à signaler, donc que le fonctionnement était normal pour elle. Le président demande quelle étaient les relations entre Mme Capelli et l’ARH. Mme Meynard répond qu’il y avait des réunions mensuelles (pour des dossiers sur lesquels des décisions devaient être prises), plus des réunions techniques avec le personnel plus technique de l’ARH. Il y avait des contacts fréquents avec Mr Sans.

Le président demande la répartition des compétences entre ARH et DASS. « Était-ce clair ? ». Mme Meynard répond que « oui », c’est clair pour la partie hospitalisation qui revient à l’ARH. « Non » pour la partie « déclaration », ni pour la partie « gestion des incidents hospitaliers », ce n’est pas clair.

Le président lui demande quelles étaient ses relations avec Mme Capelli. Mme Meynard répond qu’elle n’avait pas fréquemment de rencontre avec elle.

Le président lui demande le rôle des DRASS. Mme Meynard explique qu’il n’y avait pas de relations hiérarchiques directes entre DRAS et DASS. Les DRASS avaient leur champ propre (comme la formation des professionnels…rappelons-nous l’époque où les DRASS donnaient les numéros d’agrément des physiciens médicaux), et des champs communs DRASS – DASS, donc il y avait des relations entre DRASS et DASS.

Le président demande s’il y avait des relations (DASS) avec la préfecture. Mme Maynard répond que oui, avec la préfecture de département.

Le président demande à Mme Meynard « comment et par qui elle apprend l’accident ? ». Elle déclare l’apprendre le 15 septembre 2005 au soir, alertée par Mme Capelli. Elle dit qu’il lui est exposé un problème « d’utilisation logiciel » en radiothérapie, entrainant un surdosage, pour une vingtaine de patients. Mme Capelli est rappelée et déclare qu’elle s’attendait à un entretien avec Mme Meynard plus tard en septembre. Mme Meynard explique qu’elle est donc mise au courant de la période des accidents, des causes des accidents, et du nombre de patients (22 patients, dont 4 avec des complications avérées).

Le président demande pourquoi il a fallu attendre 3 semaines, jusqu’au 5 octobre 2005, pour faire une réunion ? Mme Meynard explique que le courrier de Mme Capelli lui parvient le 16 septembre, et Mme Capelli lui demande un peu de temps pour rechercher des informations sur les dossiers des patients. Mme Meynard dit que finalement, il est convenu que les secrétariats respectifs s’accordent sur une date, en voyant également avec l’ARH (avec Mme Mouffard).

Le président lui demande quels souvenirs elle garde de cette réunion, « qu’est-ce qui est en débat ? Qu’est-ce qui est décidé ? ». Mme Meynard dit qu’elle a piloté la réunion, il y a eu échange des faits (quelques MERM n’ont pas compris l’utilisation d’un logiciel), des conséquences, de l’information aux patients. Les patients devaient être informés, c’était clair pour Mme Meynard. Cependant, les modalités d’information sont discutées. Une lettre aux patients en contestée par MA, qui justifie de la forme trop administrative et inhumaine, donc il propose les médecins traitants, les médecins généralistes qui devraient recevoir les patients. Mme Capelli devrait quant à elle recevoir les 4 patients présentant les complications pour les informer de la cause de l’accident, Mme Capelli ayant alerté les assurances du CHJM à ce sujet. Pour les 18 autres patients, il était convenu de mettre en place le suivi et d’expliquer les causes.

Le président demande si MA a tenté de minimiser pendant cette réunion. Mme Meynard dit que non, pas sur le coup, mais plus tard.

Le président lui demande s’il y avait un PV de réunion. Mme Meynard dit qu’elle ne l’a pas fait ni transmis, car la situation lui semblait claire, elle avait confiance en Mme Capelli, et avait une bonne image des radiothérapeutes.

Il est 17h20, l’audience n’est pas achevée, l’audition de Mme Meynard est en cours. La prise de note s’arrête néanmoins ici. La suite de l’audition devait comporter les auditions de M Sans, et du représentant actuel du CH. M Castex reste présent, par souhait du président, afin que les questions puissent trouver réponse par confrontation directe si besoin entre ces personnes.